Un
retour aux sources...
Observer une société sans
être sociologue c’est, de toute évidence, la regarder avec un œil de profane.
Les remarques et les commentaires que je pourrais émettre ne sauraient être
pris comme références surtout lorsqu’au préalable aucune problématique n’a été
élaborée. Pourtant, mes deux précédentes réflexions ont attiré l’attention de
deux spécialistes qui s’intéressent particulièrement à l’Algérie et à sa
population.
Au cours d’une
conversation téléphonique que nous avons eu en triplex à mon retour, ils m’ont
demandé si j’étais parti de quelques hypothèses que je voulais valider ou si
c’était venu spontanément. Bien entendu ma réponse a été que c’était venu
naturellement ; que je m’étais exprimé normalement sans un vrai cadre de
référence formel si ce n’est la comparaison avec des moments passés et le peu de
ce que je connaissais de la société dans laquelle je vis depuis plus d’une
décennie. L’un des deux me dit mais ‘’c’est
déjà un cadre de référence que de comparer entre eux des éléments du passé et
des indicateurs du présent’’.
En fait, j’ai écrit alors
que la comparaison, qui aurait pu servir de point de départ à une réflexion,
aussi simple soit elle, était captive d’une bulle invisible dont la fonction
première devait être de m’empêcher d’être pessimiste, négatif ou encore
catastrophiste.
Lors de ce bref séjour
j’ai vu des jeunes gens et des jeunes filles en pleine possession de leurs
moyens vaquer à leurs occupations, en mouvement, d’un point donné à un autre.
Des jeunes à deux, trois ou quatre, marchant, sautillant, riant, se regardant
dans les yeux… des choses normales me diriez-vous !? Certes, oui… des
choses normales mais j’ai aussi perçu, que souvent les regards n’étaient pas
francs, loyaux, sincères…
J’ai, parfois, saisi un
petit quelque chose d’inconvenant, de sournois avec un grain de malveillance.
Il en était de même de ce regard que j’entrevoyais me dévisageant et me
pénétrant sans retenu. Il était celui de ceux et de celles qui me le lançaient
alors qu’ils/elles semblaient jouir d’un moment de repos assis en des lieux
publics donnant l’impression qu’ils/elles passaient des moments à rêvasser
alors qu’ils/elles étaient pris dans leurs pensées, leurs réflexions, leurs
projets ou peut-être dans la recherche de solutions à leurs problèmes ;
ils/elles étaient, peut être et, simplement à l’arrêt, en pause de pensée,
l’esprit vide, le regard perdu. Il y avait comme une insouciance dans un
désordre que j’ignorais, que je n’ai jamais connu auparavant. Paradoxes me
diront certain.
Des paradoxes, certes,
oui ! Mais qu’est ce qui peut les expliquer ? Une chose est certaine,
c’est que toutes et tous, seul(e)s ou en groupes, ils/elles étaient branché(e)s,
puisque fréquemment ils/elles conversaient un cellulaire dans une main, collé à
l’oreille. En considérant les unes et les autres, j’ai constaté qu’elles/ils
avaient, dans la majorité de cas, deux cellulaires… Pourquoi ? La seule
explication m’a été donnée par Abdenour, et elle résiderait dans le fait que
pour être joint et joindre un(e) ami(e), un(e) proche… il importe d’avoir le
même fournisseur de téléphonie et par
conséquent ‘’flexer’’
rapidement en payant une carte de quelques minutes. Insensé ! Selon ma perception des
choses. Cependant, une question est restée sans réponse et se décline
comme suit : Quels sont les effets d’une utilisation
intensive du téléphone cellulaire pendant de nombreuses années, sachant que plusieurs études suggèrent que l’utilisation à long
terme serait associée à un risque accru de lente croissance d’une tumeur
cérébrale et de cancer du nerf auditif ?
Par ailleurs, j’ai vu,
lors de mes promenades sur la rue Didouche Mourad, Ben Mhidi, boulevard Colonel
Amirouche, Rue Hassiba Ben Bouali,
plusieurs personnes de ma génération marchant,
seules, d’un pas rapide. J’ai été frappé par leur attitude, leur maintien, leur
posture et leur démarche… Elles ne rasaient pas les murs mais j’avais la nette
impression qu’elles se faufilaient entre les autres promeneurs, badauds et
autres désœuvrés, presqu’avec délicatesse, comme pour ne pas les déranger.
Leurs têtes aux cheveux
couleurs poivre-et-sel, souvent blancs, les traits de
leurs visages tirés me donnaient l’impression qu’elles étaient plus âgées que
moi. Ce n’était pas de la frustration ou de l’insatisfaction, c’était beaucoup
plus que cela, c’était à la fois de la désillusion, de la déconvenue, du
désenchantement que je lisais dans leurs yeux. Et, lorsque sur un chemin que j’empruntais pour aller quelques parts…,
j’en rencontrais quelques-unes qui avaient une allure svelte, une prestance
élégante et qui visiblement avaient une belle apparence… je m’en étonnais
jusqu’au moment où distinguant leurs échanges avec des passants qui les
connaissaient je comprenais qu’elles étaient comme moi, en visite, venant de
l’étranger. À trois reprises, j’ai été témoin de ce type de retrouvailles et
aussi paradoxale que cela puisse paraître, les premières se redressaient, leurs
sourires se faisaient grands, leurs visages s’illuminaient et leurs allures, leurs
prestances et même leurs apparences changeaient du tout au tout, comme par
miracle, à tel point que j’en étais heureux pour elles. Si ce n’était ma
retenue, j’ai failli me joindre à leurs retrouvailles.
Ferid
Chikhi