Hirak :
Jour 365/52 2020 02 22
Qu’attendre
des élites ?
Dans une précédente
réflexion[1] sur les
causes et les effets, ainsi que le devenir du Hirak j’avais souligné, entre
autres, qu’un système ne disparait pas mais se transforme. Cependant, personne
n’ignore que celui de la République Algérienne, s’organise, mobilise ses commis
et ses relais, s’agite pour, non pas seulement encadrer mais aussi l’infiltrer
et, le vider de sa quintessence. L’opposition n’est plus partisane mais
populaire. Les partis étant disqualifiés arrivent à peine à s’organiser pour
rapidement se désunifier. Ils ne pensent même pas à se convertir ou se
métamorphoser alors que les activistes du mouvement citoyen poursuivent leurs
actions dans l’unité au grand désespoir des premiers et des seconds. Mais
attention, les cupides, les traitres, les rapaces sont aux aguets et savent y
faire pour se replacer.
Les défis
sont nombreux pour les deux prochaines années
Le pire qui
puisse arriver serait que les dépravés de la politique politicienne, les sans
foi ni loi, de tous bords se mettent de l’avant pour encore détourner le fleuve
tranquille d’un peuple à la recherche de ses repères. La vigilance est plus que
jamais de rigueur. L’unité d’action qui fédère le mouvement tente d’éviter la récupération
par les forces du mal. Leur tour de force est de poursuivre l’éviction d’une
grande partie des auteurs des dérives qu’a connu le pays depuis plus de 30 ans.
Un président impotent, trois premiers ministres et gouvernements, des
corrupteurs et des corrompus et, même des militaires tout-puissants qui ont
gangrénés une armée populaire que le Hirak veut avec lui au nom de ‘’Chaab,
Djeich Khawa ! Khawa ! ’’. Sur le
plan institutionnel, l’ouverture de la constitution par le nouveau président fait
partie des enjeux majeurs des prochaines décennies. Son contenu devra être
républicain, citoyen et institutionnel avec de vraies références historiques et
sociétales. Les carcans doivent être dégagés et seul l’intérêt du peuple et de
l’État Algériens devront conduire sa rénovation et sa mise à niveau. Le Hirak,
doit prendre la juste mesure des nouveaux contours de la gouvernance nationale.
Les équilibres politiques sont en voie d’être adaptés et les changements majeurs
qui interviendront devront viser la pérennités en considérant les revendications
de la majorité des citoyens.
Une
feuille de route avec des objectifs collectifs
Le pouvoir
en place a désigné un nouveau gouvernement et a établi sa feuille de route.
Soumise à un parlement illégitime qui l’a approuvée, on peut être d’accord et y
consentir ou ne pas l’être et contester. Autrement dit, des questions de suivi
se posent : Le Hirak a-t-il pris connaissance des résultats de cette
pseudo approbation ? Si ce n’est pas fait, a-t-il au moins pris
connaissance de son contenu et l’a-t-il validé pour savoir s’il répond à ses
attentes ?cSi ce n’est pas le cas, l’accepte t’il ou la remet-elle en
question ? Des rassemblements, des réunions, des regroupements se tiennent
régulièrement un peu partout au pays et là où se trouvent des Algériens
expatriés ; ces rencontres servent-elles la cause ? Si ce n’est pas le cas, une des actions
premières à initier n’est-elle pas de regarder de près ce programme
gouvernemental et entériner ce qui est pour le mieux ou dénoncer tout ou partie
de son contenu ?
Dans la réflexion[2] précitée,
j’avais souligné que les hommes du nouveau régime, ne sont pas si nouveaux
qu’on pourrait le penser et pour cause, ils font partie des troisième et
quatrième cercle du pouvoir, par conséquent ils ne peuvent se défaire en un
tour de main de leurs habitudes et leurs attitudes héritées d’une ère révolue.
Ils continuent, non pas d’agir mais, de gouverner comme leurs prédécesseurs,
avec les mêmes travers, en appliquant des méthodes de résolution de problèmes
sans états des lieux ni diagnostic appropriés. Nous avons eu quelques exemples
de ces dérives citées par des ministres nouvellement installés.
Le rôle
des élites
Alors, se
pose une question essentielle : Que font les élites de l’Algérie
nouvelle ? À quelques exceptions près, elles restent cloitrées dans un
silence incompréhensible. Les professeurs des universités, ceux qui enseignent
les sciences politiques, la sociologie, la psychosociologie, l’économie, le
droit, le management, et j’en passe, ne disent rien du Hirak. Si cela arrive
dans certains cas, ils s’enferment dans des cadres de références limités à des
lectures d’auteurs et collègues ayant publié quelques écrits, restés lettre
morte. Pourtant, les thèmes du Hirak sont nombreux, depuis l’unité nationale en
passant par la mobilisation, la composante sociale, la diversité ethnique, les
catégories intergénérationnelles, les multiples revendications, les attentes et
les espoirs des uns et des autres … Ils constituent, à n’en point douter, une
diversité d’agrégats qui font rêver des dizaines de chercheurs des universités
et des académies à l’étranger. Comme bien d’autres observateurs du mouvement
citoyen qui fascine le monde par sa quiétude, son calme, sa détermination et
son intelligence collective, je comprends, l’hésitation de ces ‘’élites’’.
Mais, l’inhibition imposée par la langue de bois, la pensée unique, la
référence à un régime et un pouvoir sans partage ne sont pas facile à évacuer mais
serait-elle la seule en cause ? La réponse se trouve dans les initiatives
que peuvent prendre les uns et les autres pour anticiper l’avenir et canaliser
les forces vives vers le chemin critique qui aidera à l’atteinte des objectifs
sociétaux tant attendus depuis des décennies. C’est l’heure pour elles, pour
ces élites, de se libérer et de prendre part, avant qu’il ne soit trop tard, à
cette mutation singulière d’un peuple porté par sa jeunesse.
Novembre 1954, Février 2019 : deux actes de naissances
À 65 ans de distance, comme leurs ainés qui ont déclenché la révolution de novembre 1954 et qui se sont sacrifiés pour l’indépendance de l’Algérie, ceux des années ‘’90’’ qui ont été décimés par les hordes islamistes, l’apport des élites devient une exigence historique. Elles doivent s’exprimer, non seulement pour contribuer à formuler convenablement les désidératas du peuple qu’il soit celui des grandes villes du nord ou celui de l’Algérie profonde, non pas sous forme de slogans mais par une pensée nouvelle qui accompagne le ‘’Yetnahaw Ga3’’, elles doivent considérer les incertitudes et les dangers qui guettent l’Algérie au plan international.
À 65 ans de distance, comme leurs ainés qui ont déclenché la révolution de novembre 1954 et qui se sont sacrifiés pour l’indépendance de l’Algérie, ceux des années ‘’90’’ qui ont été décimés par les hordes islamistes, l’apport des élites devient une exigence historique. Elles doivent s’exprimer, non seulement pour contribuer à formuler convenablement les désidératas du peuple qu’il soit celui des grandes villes du nord ou celui de l’Algérie profonde, non pas sous forme de slogans mais par une pensée nouvelle qui accompagne le ‘’Yetnahaw Ga3’’, elles doivent considérer les incertitudes et les dangers qui guettent l’Algérie au plan international.
Le peuple
est en attente d’une traduction de ses rêves, de ses exigences, de ses attentes
par des réflexions que seuls les plus éclairés, les justes, les probes peuvent
lui fournir. Que ces gens sortent de l’ombre et osent loin des craintes, des
inquiétudes, des appréhensions imposées par des cadres de références dépassés
et pour beaucoup obsolètes. Si elles ne le font pas maintenant, elles ne le
feront jamais et elles seront pour toujours les révoqués de l’histoire. Il ne
faut pas oublier que nos élites, ne sont pas seulement celles qui se trouvent à
l’étranger mais elles sont aussi et surtout en Algérie. Elles se trouvent en
premières lignes d’une révolution citoyenne unique et admirée partout dans le
monde. Amener, les élites à se compromettre est un acte légitime montrant la
loyauté envers la patrie. Ils éviteront par leurs idées et leurs pensées
l’intrusion des forces étrangères qui n’attendent que leur heure pour
s’approprier les effets du Hirak. Le Hirak ce grand mouvement citoyen s’inscrit
dans la droite ligne des mouvements populaires qui soulèvent les grandes
nations. Il brise les tabous. Les lignes de démarcation ont été franchies et le
succès est juste en avant. Rester derrière ces lignes, c’est admettre malgré
soi qu’elles protègent celles et ceux qui veulent interdire toute action
positive, toute critique constructive et maintenir les ornières qui empêchent
le discernement.
Pour
conclure, rappelons-nous que la perte de sens, l’inculture, le détournement des
concepts par des arrivistes qui n’ont jamais pensé et réfléchi aux biens de
tous forment ce mur bâti par des mégalomanes tenaces et revanchards. Il faut
l’abattre pour avancer sans peur ni crainte aucune vers le progrès et la
modernité. La révolution de Novembre 1954 a sonné le glas du colonialisme et
des jeunes Algérien-ne-s se sont sacrifié-e-s pour atteindre l’objectif
assigné, celui de l’Indépendances. Le Hirak, sonne celui du totalitarisme, de
la dictature, de l’hégémonie de quelques oligarques contre le citoyen. C’est un
mouvement de jeunes qui veulent libérer la nation et ses citoyens de l’emprise
des prédateurs de tout bord. Le Hirak doit rester ferme dans sa forme et
diplomatique dans ses actions et il doit se structurer si ses animateurs ne
veulent pas tout perdre.
Ferid
Chikhi
[1]
http://www.convergencesplurielles.com/2020/02/un-numide-en-amerique-du-nord-254.html
[2]
http://www.convergencesplurielles.com/2020/02/un-numide-en-amerique-du-nord-254.html